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Fleurs de béton Fabrice

 Fleurs de béton “Toute ressemblance de près, de loin, ou vu du pont Mirabeau, avec des personnages ou situations existants serait purement fortuite et totalement indépendante de notre volonté, d’ailleurs vacillante,  ou le fruit – défendu – d’une imagination étrangère au point de vue des artistes “dégagés” que nous sommes, en somme.”

L’enfer est une rue pavée de bonnes intentions. Et bientôt piétonne. Avec des enfants de 50 ans roulant à trottinettes. Des repentis de l’embrayage se rachetant une conduite en tricotant des genoux à deux doigts du bitume , parmi la foule des condamnés à perpète aux vélos forcés. Hommes des cavernes encarossés , lâchez le volant ! Suivez la Guide du guidon . Entrez dans la République de la petite Reine ! Vous y trouverez tout le bric-à-brac du Boboland….  Mais tout de même, et d’abord, le printemps, avec son entêtement à faire du neuf. À Paris, les bourgeons bourgeonnent, le béton bétonne. Les tulipes c’est de saison. Vous en avez de belles, en dur, plantées pour durer – et vous le faire endurer – en plein Champs-Élysées, avec leurs 50 tonnes de racines coulées façon casemate et le chromo de leur aluminium poli, plus poli certes que les commentaires qu’elles inspirent… Fallait-il avec cette “chose” de Mr. Koons rendre hommage aux victimes des attentats en en commettant un autre , et la plaçant contre le Petit Palais, la laisser faire figure “d’hommage collatéral”…?  Suivant la Seine, voici que Notre-Dame, deux ans après le 15 avril, semble avoir retrouvé sa flèche. Mais non, c’est une grue de chantier ! Tout est là du Paris d’aujourd’hui : la “forêt” millénaire couronnant l’édifice est partie pour jamais, la grue finira bien par migrer, c’est dans sa nature, mais la religion des travaux battra toujours son plein. Des petits trous, toujours des petits trous. Joyeuses Pâques que celles de 2021 après JC Decaux, où le chemin de croix du parisien pourrait bien lui faire dire: “à la prochaine station, j’descends !”

Gamin de la Butte par vocation, Prévert (dont le patronyme sonne comme un nom de guerre écolo ) mâchonnerait sa révolte en même temps que son mégot en voyant que ses couples d’amoureux, ceux de Peynet et de Brassens, ne pourront plus s’abriter sous la sublime glycine de la bien-nommée Place du Calvaire, exécutée à l’heure de la rosée par un marteau-piqueur municipal. Elle avait plus de cent vingt ans, avait fleuri au nez de Bruant, tourné avec Lelouch, posé pour Utrillo, mais n’était pas vaccinée contre la bêtise…Nul doute que Doisneau rangerait aujourd’hui son appareil photo plutôt que de fixer le Baiser de l’Hôtel de Ville, car c’est désormais le baiser qui tue.  Le Nôtre, premier Vert en titre de Louis XIV, disait vouloir “tyranniser la nature” pour la soumettre aux dessins des uns et aux desseins de l’Autre. La Nôtre, première des élus du moment, prend cette verdure pour la soviétiser, l’intégrer dans un plan, servant l’idéologie à la mode plutôt que les rêveries du promeneur. Arbre opportunément placé pour cacher la forêt de béton. Et que dire de nos kiosques, témoins replets et souriants du Paris d’Haussmann, pièces d’identité d’une capitale qui s’embourgeoisait et se faisait belle, où presse et liberté s’en allaient enfin ensemble sur les Grands Boulevards, vers le siècle suivant… Trop beau, trop second Empire, trop florissant, et pourquoi donc une place de l’Étoile quand on préfère être à la place des”Ternes”! Militantisme de la laideur, vengeance ultime contre la “France d’avant”, coup de pied de l’âne..? Les kiosques ressemblent désormais à des toilettes d’aéroport par temps de covid, c’est plus contemporain. Ils ont bien des journaux, mais qui se vendent moins… Alors las, ils ont le droit de vendre des souvenirs. Qui eux, ne s’achètent pas ! F.A-W.

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